Le Directeur général du Centre national de la fonction publique locale et de la formation (Cnfplf), Abdou Kadre Ndiaye est revenu sur les fonctions de l’institution qu’il dirige. Dans cet entretien accordé au « Soleil », le directeur de Cnfplf précise que l’objectif de cette entité est de permettre une certaine revalidation des agents des collectivités territoriales.
Monsieur directeur quel est le rôle du Centre national de la fonction publique locale et de la formation (Cnfplf) que vous dirigez ?
Le rôle du Centre national de la fonction publique locale et de la formation peut se résumer autour de deux métiers. Le premier est la mise en forme et aux normes de la fonction publique territoriale et le second est la formation et le renforcement des capacités. Et dans tout processus de développement que cela soit dans les affaires ou l’administration, le facteur humain est déterminant dans la qualité des prestations. Ce centre est un établissement public à caractère administratif.
Récemment vous avez effectué une tournée dans quelques régions du Sénégal. Quel bilan à mi-parcours tirez-vous de cette tournée ?
Pour le moment, nous avons fait les 11régions du Sénégal où nous avons tenu des ateliers régionaux de développement. Il nous reste que la région de Dakar, Thiès et Kaffrine. Le bilan qu’on peut en tirer est que c’était une démarche d’écoute et de partage sur une nouvelle structure qui vient d’être mise en place par le Chef de l’Etat Macky Sall. Même si la fonction publique territoriale est une nouveauté, la formation et le renforcement des capacités ne sont pas de nouvelles activités au niveau technique. Mais il faut noter que sous le format du centre, avec des fonctions dédiées, des missions spécifiques précises, c’était important pour nous d’avoir une démarche inclusive au niveau des acteurs dans le domaine de la décentralisation.
La gestion des ressources humaines de qualité est le tendon d’Achille des collectivités territoriales pour mener à bien les politiques de décentralisation. Qu’est-ce que le centre propose comme solution ?
Nous avons pour mission de leur apporter une expertise en matière statutaire, de gestion des carrières, de couverture médicale et sociale, de gestion de la retraite et d’avancement d’administration et de gestion du personnel en général. Cela part du recrutement du personnel c’est-à-dire la définition et l’affinement dans le cadre du recrutement, jusqu’au départ à la retraite. En résumé, c’est tout le cycle de vie de l’agent qui est ciblé. Il faut noter aussi que nous ne devons pas nous substituer aux collectivités territoriales en vertu du principe de libre d’administration, non plus nous substituer au commandement territorial qui, en vertu du Code général des collectivités territoriales dans des domaines bien spécifiques, s’occupe du contrôle de légalité.
Depuis des mois, les agents des collectivités territoriales sont en grève. Que peut-on espérer du centre pour que pareilles situations ne se produisent ?
La grève a un fondement légitime et légal qui vise l’article 29 et 30 de la loi 2011 sur la fonction publique locale qui stimule que toute valorisation au niveau de l’Etat central des agents doit être répercutée au niveau des agents de la fonction publique locale en vertu du principe de parité. Maintenant, dans les modalités de prise en charge, ces revalorisations doivent normalement revenir aux exécutifs territoriaux qui sont des employeurs au sens du droit du travail. Maintenant compte tenu de certaines difficultés, l’Etat est obligé d’accompagner ce processus. Et c’est pourquoi le ministre en charge des collectivités territoriales Mamadou Talla, sur instruction du Président de la République Macky Sall a pris un arrêté pour mettre en place un comité de collecte pour gérer cette crise. Ce comité est inclusif car l’intersyndical est représenté et il est présidé par moi-même. Nous devons boucler nos travaux d’évaluation des effectifs théoriques de la fonction publique territoriale pour permettre à l’autorité d’apprécier l’impact de cette revalorisation au niveau central, qui est légitimement réclamée par les travailleurs des collectivités territoriales et identifié en fonction de la cartographie et du régime de chaque collectivité quelles sont celles qui peuvent prendre en charge ou non ces revalorisations. Nous comprenons l’impatience de l’intersyndicale, mais ils sont dans d’excellentes dispositions.
Six mois depuis la création de ce centre, quelles sont les actions menées ?
Durant ces six mois, nous avons pu mettre en place des équipes techniques, un facteur déterminant de la réussite. Nous avons pu aussi élaborer notre plan stratégique de développement sur 5 ans, un manuel de procédure. Nous avons fait des activités de relations publiques d’informations et de sensibilisation. Dans le domaine de la fonction publique territoriale, nous avons commandité et conduit quelques études dont le plus déterminant est lié au cahier de charge pour un système d’information des ressources humaines territoriales. Car le charme de cette fonction publique, à la différence de cette fonction publique centrale, nous avons qu’un seul employeur et les ministères sont des utilisateurs. L’enjeu pour nous, c’est de trouver un mécanisme opérant qui puisse permettre de gagner du temps. Et nous envisageons d’avoir ce système d’information des ressources humaines territoriales.
Nous avons aussi consolidé le fichier national des agents de la fonction publique territoriale sur la base des commissions ad hoc d’intégration. Nous sommes en train de mettre en place un comité pour mettre à jour certaines dispositions de la loi de 2011 notamment au niveau du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale où ce n’était pas encore l’avènement du centre. Donc il ne pouvait pas être dans le dispositif institutionnel. Nous avons réalisé un certain nombre d’études du plan stratégique parce qu’il y a des questions judiciaires sur lesquelles beaucoup de rapports diagnostic avaient déjà structuré un certain nombre de problématique au niveau de ces métiers. C’est une étude sur le dispositif d’assurance qualité.
Qu’est ce qui est prévu dans le cadre de la capacitation des agents du secteur ?
On a commandité une étude sur un dispositif de formation initiale et continue. Le centre a un important projet sur la digitalisation de la formation. Un programme spécial de formation qui est destinée aux nouveaux exécutifs territoriaux est aussi élaboré. Le centre a aussi hérité du suivi technique et opérationnel des programmes de formation du Programme d’appui aux communes et agglomérations du Sénégal (Pacasen). Dans le cadre des ateliers régionaux de développement, nous avons en gestation une démarche collaborative qui sera actée par une convention et nous faisons de même aussi avec les autres services de l’Etat au niveau décentralisé ou déconcentré. Au niveau interne, nous avons également élaboré deux guides dont celui d’administration et de gestion du personnel qui sera le livre de chevet de tous les managers des ressources humaines dans les collectivités locales. Il retrace, modélise et standardise l’ensemble des actes auxquels un manager des collectivités locales peut être confronté, avec aussi des références. L’objectif est d’asseoir cet espace territorial et garder la quintessence de la décentralisation. La finalité de la collectivité, c’est de proposer des prestations aux populations par rapport au domaine de compétences.
Quelles sont les perspectives du centre ?
Nous avons un plan stratégique qui est notre tableau de bord. Dans ce plan stratégique, nous avons un certain nombre d’actions prioritaires, dont d’audit social du fichier des collectivités territoriales pour mettre en corrélation et en épreuve le profil post emploi et l’utilité. L’objectif c’est de promouvoir la gestion axée sur les résultats, la reddition des comptes entre autres. Nous avons en perspective conformément à la loi, l’organisation de concours parce que la fonction publique territoriale, on y accède par concours. Ce principe s’inscrit dans une démarche de professionnalisation. Nous avons également la démarche d’harmonisation de la masse salariale qui passe par le traitement des fiches de paie pour promouvoir l’équité avec le principe de la standardisation des émoluments entre les acteurs de différentes collectivités. Nous avons tous ces chantiers en vue. Sur l’aspect formation, nous avons en ligne de mire la délivrance d’une formation diplômante. Nous avons beaucoup de requalification et de repositionnement de carrières dans les collectivités territoriales. Et tout cela, nous voulons le faire à travers un mécanisme de la digitalisation.
Propos recueillis par Amadou Maguette NDAW